•  

    J'ai presque peur, en vérité

     

     

    J'ai presque peur, en vérité,
    Tant je sens ma vie enlacée
    A la radieuse pensée
    Qui m'a pris l'âme l'autre été,

    Tant votre image, à jamais chère,
    Habite en ce coeur tout à vous,
    Mon coeur uniquement jaloux
    De vous aimer et de vous plaire ;

    Et je tremble, pardonnez-moi
    D'aussi franchement vous le dire,
    A penser qu'un mot, un sourire
    De vous est désormais ma loi,

    Et qu'il vous suffirait d'un geste.
    D'une parole ou d'un clin d'oeil,
    Pour mettre tout mon être en deuil
    De son illusion céleste.

    Mais plutôt je ne veux vous voir,
    L'avenir dût-il m'être sombre
    Et fécond en peines sans nombre,
    Qu'à travers un immense espoir,
    Plongé dans ce bonheur suprême
    De me dire encore et toujours,
    En dépit des mornes retours,
    Que je vous aime, que je t'aime !

     

     

    Paul Verlaine

     


    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique